Jérome Rivkine a transformé l’épreuve de la maladie en une force et un savoir. Devenu patient-expert et sportif convaincu, il est membre du comité Sport Santé Insertion de la Fondation de France.
En 2013, Jérome Rivkine a 37 ans. Et la vie réussit plutôt bien à ce jeune avocat. Fils d’un chirurgien et d’une biologiste, il a grandi dans l’Oise. Gamin, il aime la nature, le tennis… Ce droitier classé 15/4 possède un bon service et un revers à une main. Il admire Boris Becker. Après ses études, il choisit le Droit international puis monte son cabinet dans le quartier des Batignolles, dans le nord-ouest de la capitale.
C’est au printemps de cette année-là que les médecins annoncent à Jérome Rivkine, alors père de deux jeunes enfants, qu’il souffre d’un cancer des poumons, celui du non-fumeur. Le diagnostic est formel, il ne lui reste que quelques mois à vivre. Il se souvient : « Cela a été comme si je dégringolais d’une falaise. Tout en suivant ma chimio, j’ai tenté de me raccrocher à toutes les branches : magnétiseur, thérapeute, etc. Certaines rencontres m’ont aidé, d’autres m’ont secoué. J’ai surtout essayé de comprendre ce qui m’arrivait. » Il insiste : « Je ne me suis pas laissé aller à fantasmer sur la mort. J’ai choisi Eros contre Thanatos. J’ai travaillé à m’ancrer dans le présent. A me rendre compte de l’importance de chaque instant du quotidien. J’ai appris à me soigner, à devenir patient au sens premier du terme. »
Dix ans après, Jérome Rivkine est toujours là. Rien n’a été facile. Il a rechuté quatre fois mais sa maladie s’est stabilisée. S’il n’a pas repris pour l’heure son activité d’avocat, il y pense. Dans l’intervalle il a transformé son expérience de la douleur et son approche du système de soins en un savoir qu’il s’applique à transmettre.
Il est devenu ce qu’on nomme un patient-exper t ou un patientpartenaire qui théorise son vécu afin que les acteurs du système de santé puissent le prendre en compte. Il rappelle qu’il y a « 25 millions de malades chroniques en France » et estime que la démocratie sanitaire n’existe pas sans représentation des patients. Il a écrit un livre (Les cinq saisons, L’Harmattan), intervient en tant que bénévole au sein d’une association de patients, l’APOP Foch, à l’hôpital Foch de Suresnes. Et donne des cours à la Sorbonne aux futurs médecins généralistes. L’activité physique l’a aidé pendant sa maladie : « Cela m’a permis de me réapproprier mon corps, de retrouver le moral. »
Il est ainsi devenu ambassadeur des patients à la Cami Sport et Cancer. La Cami, fondée par un oncologue et un champion de karaté, a défini un programme adapté qui tient de la gym douce et du Pilates. La Fondation de France, Jérôme Rivkine la connaissait : « de réputation, en tant que fondation de toutes les causes ». Il a été honoré d’être nommé au sein du comité Sport Santé Insertion de la Fondation. Il apprécie de se soucier des questions de vulnérabilité et d’inclusion, de pousser à l’activité physique pour lutter contre le cancer mais aussi contre l’obésité, dans des zones rurales ou des cités en zones urbaines. Il analyse les projets et participe aux décisions de soutien. Mais ce qu’il préfère, c’est d’aller à la rencontre des porteurs de projets, « un moment toujours énergisant » confie-t-il. Comme si deux vitalités se rencontraient pour s’épauler.